DAUGHN GIBSON – Me Moan

13145Année 2013
Pays États-Unis
Label Sub Pop
Genre Lee Hazlewood 3.0

J’ai conscience de ne pas être très prolifique, je ne l’ai jamais vraiment été hein, depuis presque un an et je sais que vous êtes au – bas mot – des millions à réclamer à cor et à cri une intervention, même minime, de ma part sur la blogosphère. Disons que les raisons de mon inactivité sont souvent les mêmes: j’écoute beaucoup trop d’albums qu’ils soient récents ou (surtout) anciens, j’ai également des projets dans la vraie vie et pas que sur les internets et aussi je passe le plus clair de mon temps à faire du crate digging de vinyles ou d’habits (j’avoue que les beaux vêtements sont l’une de mes grandes passions). Contrairement à la pléiade de blogs qui enchaînent les chroniques sans identité propre, j’aime personnellement écrire et approfondir sur la musique et pour moi il y a trois facteurs importants afin de rédiger un texte: le temps, l’inspiration et l’envie. Si tous ces éléments ne sont pas réunis, j’ai du mal à continuer (si vous saviez la vingtaine de critiques que j’ai abandonné au bord de la route l’été venu). Je me refais donc la main aujourd’hui avec le nouvel opus de Daughn Gibson, oui le même qui avait relancé la version 2.0 de ce blog avec son monumental premier album (et accessoirement l’un des seuls gars qui soit presque aussi parfait que moi).

Que s’est-il passé en un an pour le pennsylvanien ? Un « All Hell » encensé par la critique et dont le vinyle limité à 400 exemplaires s’est rapidement épuisé (une version cd a depuis été édité), des titres parsemés ci-et-là comme « Reach Into the Fire » dévoilé lors de sa signature chez Sub Pop – ou comment manier avec talent le sampling, domaine où notre cher Daughn excelle à merveille – et un premier extrait de « Me Moan » en avril dernier (le très efficace « The Sound of Law » à la rythmique drum’n’bass qui démarre d’ailleurs l’album), coïncidant également avec l’annonce des premiers concerts en Europe dont un sur Paris, mais finalement annulé dû au peu de billets vendus. Notre beau pays n’est définitivement pas prêt à accueillir un artiste de cette trempe.

Mais revenons au disque en lui-même. Une de mes inquiétudes avec la signature sur un plus gros label que White Denim était de voir la musique de Daughn Gibson être formaté, crainte quelque peu avéré avec le titre susnommé non pas qu’il soit décevant loin de là (je le trouve même excellent), mais cela fait bizarre d’entendre la structure classique couplet/refrain de sa part alors que je considère qu’il n’est jamais aussi bon lorsqu’il décide de partir en roue libre. Mais en fait, j’avais tout faux.

daughn-gibson-weekendRien n’a changé, sa voix est toujours un mélange entre un Scott Walker, un Johnny Cash ou un Lee Hazlewood (l’influence du célèbre moustachu se fait d’ailleurs de plus en plus grandissante dans l’utilisation de son timbre de voix) et Daughn Gibson démontre à nouveau sa capacité à engendrer des chansons aux samples tout bonnement hallucinants (les cornemuses de « Mad Ocean », les chants hindous féminins de « You Don’t Fade » ou « The Right Signs » et son final psychédélique). Si « All Hell » pouvait être considéré comme un véritable terrain de jeu et un exutoire afin d’exorciser ses propres démons en dépeignant une image glauque et peu reluisante de la famille et de la religion de l’Amérique profonde, « Me Moan », (mis à part le claustrophobique « Pigee Nest » dont la tonalité semble être tout droit sorti du premier album), s’avère être au final assez optimiste – enfin c’est relatif – et empreint d’une nostalgie et d’une mélancolie jusque là insoupçonnées de sa part (« All My Days Off », « Into the Sea ») et même d’un romantisme exacerbé (« Won’t You Climb »). Le point culminant étant le sublime – et je pèse mes mots – « Franco », à la mélodie inspirée par « Stranger in the Night » (« If you need my love let it go through you all the way in / If you need my love I could stand around quiet to ’til you say you win / If you’re still unsure and time can only bend you like nothing else can / You can always find my love bleeding from trying to get the earth to lift »). Un Daughn Gibson apaisé et amoureux ?

« Give us a way for two lips to collide / I wish we had a kid / Who never wanted to die » (Franco)

Un petit bémol à propos de « Kissin’ on the Blacktop », pas sur la chanson, clairement pas la meilleure du disque il est vrai, mais plutôt sur le clip que je trouve assez désastreux bardé de stéréotypes (je vous conseillerais plutôt de jeter un oeil sur l’excellent court métrage « All Hell » de Luke Tickner), sans doute réalisé ainsi afin de faire découvrir l’univers de Daughn Gibson (cowboys, crooner, rockabilly, bar, bières, filles de petites vertus). Cependant, je pense qu’il ne faut absolument pas prendre au premier degré la plupart de ses textes et je soupçonne le gars d’avoir un humour assez fin et sachant même faire preuve d’autodérision malgré sa mine de camionneur barbu et poilu. Je rajouterais un coup de gueule à cause des différentes éditions de l’album et ceci décidé par Sub Pop (une uniquement pour Rough Trade avec un EP bonus et une autre en vinyle coloré avec un 45 tours de ses deux premiers titres réalisés en 2001 apparement). Enfin je dis ça parce que j’ai chopé le vinyle noir standard sans savoir qu’il y avait toutes ces versions hein.

Au final, Daughn Gibson se savait attendu et aura réussi à éviter l’écueil de pondre un « All Hell bis » souhaité par la plupart de ses fans (moi inclus). Alors que beaucoup n’arrivent guère à passer le cap d’espoir suite à un premier album encensé, lui l’aura fait avec brio, ce qui est plutôt rare dans la musique actuelle.

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Publié le 25 juillet 2013, dans Électronique, et tagué , , , , , , . Bookmarquez ce permalien. Poster un commentaire.

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