KENDRICK LAMAR – To Pimp a Butterfly
Année: 2015
Pays: États-Unis
Label: Top Dawg/Aftermath
Genre: The biggest hypocrite of 2015
Fort heureusement que dans ce marasme musical ambiant où l’on doit essentiellement se coltiner des revivals souvent surannés, des copies de copies d’untel, d’une nostalgie qui suinte la naphtaline ou d’une pop sclérosée, émergent ces artistes hip hop, neo-soul et r’n’b qui dans cette recherche perpétuelle d’une efficacité et d’une mélodie pop, dynamitant ainsi les normes et les conventions, se posent en héritiers de la musique POPulaire des sixties et seventies et je n’ai pas eu besoin de Pitchfork – site où je ne vais jamais – pour être convaincu qu’il s’agit de l’un des derniers bastions où l’on fait encore preuve de risque, de créativité et d’inventivité puisque cela fait plus de vingt ans que j’en écoute. Doit-on ainsi rappeler que la techno et le hip hop – notamment la période boom bap new-yorkaise de 1993 à 1996 – auront été parmi les deux dernières révolutions musicales ? Ce n’est donc peut-être pas un hasard si finalement je considère que les albums les plus passionnants de ces cinq dernières années (hors Blut aus Nord et d’autres disques de black metal) sont ceux de Kanye West, Justin Timberlake, Run the Jewels, d’Angelo et Kendrick Lamar. Et pour paraphraser le génial Vindsval de BaN: « Tout ce qui n’évolue pas est destiné à pourrir sur place, l’art n’échappe évidemment pas à cette règle universelle ». CQFD. Ce statut de nouvelle musique populaire n’est cependant peu reconnu par les fans de rock, vous savez ce vieux machin qui gigote encore, preuve en est cette récente pétition contre la participation de Kanye West au festival Glastonbury, symptomatique du rejet du hip hop – enfin ça dépend par qui c’est fait, faut pas que cela soit grand public ou qu’il ait tué de chat – et par quelques déclarations, sans doute inconsciemment, sous-jacentes racistes (mais bon le mec qui a initié cette pétition s’appelle Neil LoNSdale on ne sait jamais) et débiles comme quoi ce n’est ni de la « vraie musique » ni de la « musique à guitares ». Bel esprit de ghettoïsation musicale ma foi…
Une réussite en tout point de vue, « To Pimp a Butterfly » se doit cependant d’être apprivoisé. Dense, touffu, mais malgré tout d’une impitoyable limpidité, il foisonne tellement d’idées qu’il fait partie de ces albums où l’on découvrira toujours un détail que l’on n’avait sans doute pas remarqué auparavant, c’est simple, à chaque fois que je l’écoute (et je ne compte plus), je n’ai jamais l’impression que c’est le même disque. A l’instar de « »My Beautiful Dark Twisted Fantasy« , « TPAB » est à marquer d’une pierre blanche dans l’histoire de la musique moderne et cela va bien au-delà du hip hop. Et même si nous sommes qu’au tiers de 2015, il sera très difficile de voir un album supérieur à celui-ci… Cependant, devra-t-on attendre encore cinq années avant d’avoir une œuvre d’un tel calibre ?